Masterclass JOKKO 2025 : Moustapha Mbodj révèle les clés du parcours client au Sénégal
Le 22 novembre 2025 au Cinéma Pathé, plus d’une centaine de jeunes ont assisté à la quatrième Masterclass JOKKO organisée par FORCE-N. Pendant deux heures, Moustapha Mbodj, consultant senior en UX/CX, leur a transmis sa vision du parcours client et les a invités à devenir des “chasseurs de frustrations”.
« Le silence entre les notes est aussi important que les notes elles-mêmes », disait Mozart. Comme le compositeur autrichien, Moustapha Mbodj fait du silence un élément à part entière de son œuvre – sa masterclass - de ce samedi 22 novembre. Un silence pesant, qui dura 8 secondes et qui installa l’étonnement, l’inconfort et puis la frustration. Mais un silence illustratif, qui parle autant que les mots. Car ces 8 secondes de silence représentent exactement le temps que met un internaute sénégalais pour quitter une application qui ne marche pas. La démonstration est faite. Fondateur de M2 Digital Lab à Paris et Africa Blue Interaction à Dakar, Mbodj connaît son sujet. Pour cette Masterclass JOKKO, initiative de FORCE-N en partenariat avec l’Université numérique Cheikh Hamidou Kane et Mastercard Foundation, il a choisi de parler vrai.
Le tailleur et la fintech : même combat
Son premier exemple parle à tout le monde. Le tailleur sénégalais. On lui donne un délai trois jours avant le vrai besoin. Parce qu’on anticipe les coupures, les pannes, les retards. « L’UX, c’est la tenue, la couture, les broderies. Le CX, c’est l’accueil, les délais, l’appel quand c’est prêt, le thé qu’on propose. Vous pouvez avoir la plus belle robe du quartier. Mais si elle arrive le lendemain de la Tabaski, elle symbolise quoi ? De la frustration ». Dans le numérique, c’est pareil. Une fintech locale a une belle interface, des boutons clairs, plusieurs langues. Mais quand un client envoie 50 000 francs et ne reçoit aucune confirmation, le résultat est négatif. Il essaie le service WhatsApp. Silence. « Techniquement, tout s’est bien passé. Mais après l’envoi, blackout total ».
Il cite d’autres exemples concrets de situations où le parcours client est négligé : les vendeurs dakarois qui traitent mal les clients parce que la demande est forte, les chauffeurs Allô Dakar qui disent « si tu es pressé, tu peux partir ». « Netscape a disparu. MSN aussi. On ne sait jamais. Si Google dépense tant pour sublimer l’expérience, c’est parce que la clientèle est volatile ».
Mbodj évoque Wave comme modèle. La plateforme connaît vos revenus via les flux entrants, vos trajets via Yango, vos habitudes alimentaires via les paiements QR. « Si depuis deux jours Adama ne flashe plus chez Jolof Chicken alors qu’il y achète du poulet chaque jour, Wave peut lui envoyer une relance. Ce n’est pas du spam, c’est de l’assistance ». Il appelle ça la « Data Teranga », transformer l’hospitalité sénégalaise en parcours client optimisé. Sa méthode tient en trois piliers : empathie pour observer les vrais usages au marché Sandaga, analyse pour faire parler les chiffres, design système pour que tout charge, même en 3G.
Briser le syndrome de l’imposteur
Loïs Kreman, la modératrice, insiste : « Le Sénégal a besoin de vous. L’Afrique attend le réveil de sa jeunesse ». Mbodj confirme. Lui aussi a douté. Ingénieur chez Engie sur les compteurs Linky, il a géré des projets internationaux. Son conseil ? Ne pas attendre les offres d’emploi. « Vous observez un parcours, vous voyez ce qui ne va pas, vous proposez la solution avec le retour sur investissement. Au Sénégal et en Afrique, on n’a pas un problème de compétence. Le problème, c’est le syndrome de l’imposteur ».
Dans quelques semaines, FORCE-N organisera un nouveau JOKKO. D’ici là, certains alumni auront peut-être lancé leur entreprise ou convaincu une administration de repenser son parcours. Huit secondes de silence pour ouvrir une conférence, huit secondes d’attente pour perdre un client. Le message est passé.
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